A. Fourcade. Une excursion à Ferrières et Arbéost en 1835

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Album pittoresque et historique des Pyrénées

Dans le chapitre XIII de son ouvrage, A. Fourcade conseille une excursion d’Aucun à Arbéost et Ferrières, avec retour par le val de Bergons. Quelques notations parfois savoureuses viennent agrémenter la description.

Album Pittoresque, chapitre XIII

On retiendra en particulier les considérations sur les habitants d’Arbéost et de Ferrières, parfois désobligeantes pour ces derniers – les Ferrarais – c’est ainsi qu’A. Fourcade les nomme.

Le peuple qui l’habite se partage en deux classes distinctes et isolées entre elles par la nature des travaux auxquels elles se livrent : c’est un peuple de forgerons et de bergers. Les paysans d’Arbéost, village placé dans la partie supérieure, s’adonnent tous à la culture des champs et spécialement à la vie pastorale ; ceux des Ferrières consacrent leur existence aux pénibles travaux des mines. Le regard vif, le teint frais, les membres arrondis des uns tranchent d’une manière sensible avec la figure pâle, l’œil cave et vitré, les traits anguleux des autres.

Quelle vie que celle des derniers ! Dans toutes les saisons, la plupart, de ces pauvres gens se rendent aux marchés d’Argelés et de Nay. On les voit, même en hiver, descendre de leurs pics glacés, traverser des montagnes couvertes de neige, et, après une marche longue, pénible et dangereuse, venir vendre au chef-lieu de la vallée une centaine de clous.

Berger de la vallée d’Ossau. Fonds Ancely. Toulouse

[…] La différence que j’ai signalée entre les habitants d’Arbéost et ceux des Ferrières, ne se retrouve point dans le caractère, le langage et le costume de ces montagnards. Tous portent le large berret, la veste rouge et le gilet blanc. Plusieurs d’entre eux laissent croître et flotter leur chevelure par derrière, ce qui donne à leur physionomie quelque chose de grave et d’antique. Quant aux facultés intellectuelles et morales, le Ferrarais se ressent beaucoup plus de ses relations avec les Béarnais que de celles qu’il entretient avec les habitants d’Azun. Vous reconnaîtrez dans la tournure de son esprit, dans son caractère et son langage, ce ton doux, ingénieux et poli que vous avez déjà vu chez ses voisins du Béarn. p. 144-146.

Cet Album [1] s’inscrit dans une longue suite de publications parues tout au cours des premières décennies du XIX° siècle, alors que se développait la mode des stations thermales et le « goût de la nature » des riches citadins.

Dans l’Excursion bibliographique qui introduit «Cent ans aux Pyrénées»  [2] , Henri Beraldi s’interrogeait sur la « série d’écrits formant l’histoire du pyrénéisme » :

« Qui les visite [les Pyrénées] ? Des hommes de sommets, pour lesquels il n’y a pas de Pyrénées au-dessous de trois mille mètres ; – des hommes de demi-sommets, recherchant moins la difficulté que le pittoresque de la montagne et la beauté des observatoires ; – des hommes qui n’apprécient la montagne que dans les vallées ; – enfin des hommes pour qui les Pyrénées signifient exclusivement casino ou grande douche.

De là les diverses littératures pyrénéistes : livres de sommets, livres de demi-sommets, livres de vallées, livres d’établissements thermaux ».

Beraldi plaçait visiblement l’ouvrage d’A. Fourcade dans une de ces dernières catégories : livre de vallées ou livre d’établissements thermaux [3] :

« Album pittoresque et historique des Pyrénées […] ; c’est un guide pour la tournée de Pyrénées, Pau-Luchon. Attardé comme style, il a adopté la nouvelle typographie romantique, le format et l’impression qu’on pourrait appeler « à la Renduel », du nom de l’éditeur des romantiques ».


⇒ Lire la première partie du chapitre XIII de l’Album pittoresque et historique des Pyrénées


On se replacera dans l’air du temps des années 1830 : les riches touristes venaient « aux eaux » aux Pyrénées et voyageaient de station thermale en station thermale, jetant un œil légèrement supérieur sur les populations autochtones…

L’itinéraire décrit conduit d’Aucun à Arbéost probablement par le col de Berbeillet ou celui de Soum. Le retour vers Argelès passe par le Coddansa et le val de Bergons. On reconnaîtra dans ce Coddansa, le Cot d’Ansa (ou d’ença), l’actuel Col d’Ansan, qui fait communiquer la vallée de l’Ouzom et le val de Bergons à 700 m au Nord du Col des Spandelles.

Voir le Col des Spandelles sur la carte IGN.

– L’ouvrage est consultable et téléchargeable sur le site « Google, recherche de livres » :

Fourcade, Album pittoresque et historique des Pyrénées

 

[1] A. Fourcade, Album pittoresque et historique des Pyrénées, 1835, Paris, Aubanel, Dentu, Bohaire, in-8, 391-VIII p.

[2] Henri Beraldi. Cent ans aux Pyrénées, 7 tomes édités de 1898 à 1904, réimpression par Les amis du Livre Pyrénéen, Pau, 1977.

[3] Henri Beraldi. Cent ans aux Pyrénées, tome II, p. 64A

24 février 2008 par Émile Pujolle